Nouvelle victoire diplomatique pour Cuba

Vote aux Nations Unies contre le blocus

Les 1er et 2 novembre, les États membres des Nations unies ont à nouveau examiné la proposition de résolution de Cuba visant à exiger la levée du blocus étasunien contre l’île.

187 pays ont voté en faveur de la levée du blocus (contre 185 en 2022), 2 ont voté contre (les États-Unis et Israël), 1 pays (l’Ukraine) s’est abstenu (contre 2 en 2022). Cuba remporte ainsi une nouvelle victoire diplomatique. Il appartient maintenant à toutes les forces de solidarité de transformer cette victoire en actes.

Faim, désespoir et renversement du gouvernement

L’embargo économique, commercial et financier contre Cuba constitue l’élément central de la politique étasunienne envers l’île depuis le triomphe de la révolution en 1959.

L’objectif, tel que décrit par Lester Mallory, fonctionnaire du département d’État étasunien, dans un mémorandum d’avril 1960, était de provoquer « la faim, le désespoir et le renversement du gouvernement ».

Cette politique ne vise pas uniquement la suspension des échanges commerciaux entre les citoyens et les entreprises des États-Unis et Cuba. Au contraire, elle cherche à obtenir l’application extraterritoriale la plus large possible de ses propres lois, ce qui rend très difficile pour Cuba de commercer avec d’autres pays, et l’isole du reste du monde.

Joe Biden sur les traces de Donald Trump

Ces dernières années, le blocus a atteint des niveaux sans précédent avec les 243 nouvelles sanctions et mesures sévères instaurées par Donald Trump au cours de sa présidence.

La grande majorité d’entre elles sont restées d’application sous le gouvernement Biden. Parmi celles-ci, on retrouve l’inscription totalement injustifiée de Cuba sur la liste des États soutenant le terrorisme (State Sponsors of Terrorism – SSOT), un cadeau d’adieu de Trump lorsqu’il a quitté ses fonctions en 2021.

Le fait de figurer sur cette liste exclut Cuba des transactions bancaires internationales et rend de plus en plus difficile l’achat de produits de première nécessité tels que le carburant, la nourriture, les médicaments et les produits d’hygiène. Quarante-cinq banques internationales ont immédiatement mis fin à leurs relations avec Cuba lorsque le pays a été inscrit sur la liste.

Une perte de plusieurs milliards pour Cuba

Depuis, les Cubains sont confrontés à une situation économique de plus en plus difficile. Les pénuries alimentaires, les longues files d’attente et le manque de médicaments ont plongé le pays dans la pire crise économique et humanitaire qu’il ait jamais connue.

Un rapport du ministère cubain des Affaires étrangères (Minrex) publié à la suite du vote des Nations unies décrit en termes sombres l’ampleur de l’impact du blocus sur Cuba et son peuple sur une période d’un an : pour la période du 1er mars 2022 au 28 février seulement, les dommages se sont élevés à 5 milliards de dollars.

Aux prix actuels, les pertes cumulées depuis six décennies de blocus s’élèvent à près de 160 milliards de dollars. Que signifie cela pour les citoyens cubains ordinaires ?

Conséquences sur l’enseignement, l’agriculture et les soins de santé

Dans le domaine de l’enseignement, Cuba éprouve d’énormes difficultés à fournir des fournitures scolaires de base telles que des livres et du matériel pédagogique.

Au cours de cette même période, plus de 110 000 élèves ne disposaient pas d’un ensemble complet de cahiers. Un exemple de la nature extraterritoriale du blocus : L’University College de Londres n’a pas pu envoyer du matériel informatique dans le cadre d’un projet commun avec la faculté de technologie Jose Antonio Echeverria de l’université de La Havane.

Le secteur agricole cubain est également gravement touché : l’accès aux réserves, aux matières premières et aux technologies nécessaires au développement de l’agriculture moderne est très limité. La société canadienne Cypress View Land a récemment interrompu son projet de production de céréales à Cuba par crainte de poursuites judiciaires, car elle est également active aux États-Unis. Tout cela, parmi d’innombrables autres exemples, a entraîné une forte baisse de la production alimentaire nationale et mené à des pénuries partout sur l’île.

Dans le secteur de la santé, les pertes se sont élevées à près de 240 millions de dollars en un an. Cette situation a eu un impact dévastateur sur la santé du peuple cubain, malgré la solidité du système de santé cubain, qui jouit d’une renommée internationale. Les taux de mortalité infantile se sont aggravés, passant d’environ 5 décès pour mille naissances en 2019 à 7,5 pour mille en 2022. Le rapport du Minrex met en lumière le cas d’une petite fille de six ans dont le combat contre le cancer a été compromis par le blocus :

« Bien qu’il ait été possible de lui administrer la chimiothérapie, elle n’a pas pu recevoir de lomustine, un médicament de pointe pour traiter les tumeurs avancées de ce type. » Aujourd’hui, elle fait une rechute. Pour cette fillette, comme pour beaucoup d’autres enfants cubains, le blocus de leur pays est une question de vie ou de mort.

Des paroles et des actes

La communauté internationale est unanime dans son opposition à l’isolement forcé de Cuba. Le gouvernement britannique a également voté en faveur de la résolution de Cuba aux Nations unies cette semaine.

Le gouvernement britannique demandera à nouveau aux États-Unis de mettre fin au blocus, qu’il qualifie de « nuisible et contre-productif » et qui « affecte négativement le niveau de vie du peuple cubain et entrave le développement économique du pays ». De belles paroles, mais le gouvernement britannique doit en faire davantage pour contrer le blocus et protéger les entreprises et les particuliers britanniques qui souhaitent commercer avec Cuba, déclare la Cuba Solidarity Campaign.

La Belgique vote contre le blocus, mais…

On peut dire la même chose de la Belgique. Notre pays vote contre le blocus, mais ne prend aucune mesure concrète. La Ministre des Affaires étrangères, Hadja Lahbib, écrit sur son site web

« Cuba traverse actuellement l’une des pires crises socio-économiques depuis le début de la révolution, avec des pénuries de nourriture, de médicaments et de carburant, dues au renforcement de l’embargo étasunien et aux conséquences de la pandémie du covid-19, au contexte international, mais aussi au manque de réformes économiques.

Dans ce contexte, le blocus économique, commercial et financier imposé à Cuba par les États-Unis a un impact néfaste et affecte très clairement le niveau de vie du peuple cubain.

Chaque année aux Nations Unies, la Belgique, comme l’ensemble de l’Union européenne, vote en faveur de la résolution qui appelle à mettre fin à cet embargo.

Notre avis est que le commerce extérieur et les investissements étrangers peuvent jouer un rôle crucial pour mettre Cuba sur la voie de la modernisation, des réformes et d’une croissance durable et l’aider à surmonter ses difficultés économiques.

La Belgique, tout comme l’UE, estime par conséquent que la levée du blocus pourrait rendre les réformes économiques plus efficaces et faciliter l’ouverture de l’économie cubaine.

Cela ne veut pas dire que nous ne sommes pas préoccupés par la situation des droits humains à Cuba, en particulier à la suite des événements de juillet 2021 et notamment par les jugements sévères rendus par les tribunaux cubains.

Nous réitérons donc notre appel au gouvernement cubain pour qu’il libère les prisonniers politiques, et accorde à ses citoyens les droits et libertés civils, politiques et économiques internationalement reconnus.

Plus largement, Cuba doit veiller à ce que les réformes judiciaires, économiques et sociales soient effectivement mises en œuvre. Les préoccupations de la population cubaine, ainsi que la satisfaction des aspirations légitimes du peuple cubain à davantage de possibilités de participer à la construction de l’avenir du pays doivent être entendus également par le gouvernement cubain. »

La Belgique s’oppose donc au blocus, mais dans l’optique de promouvoir « l’ouverture de l’économie cubaine ». En d’autres termes, le blocus nous empêche de faire des affaires dans ce pays et de conquérir les marchés cubains.

En outre, bien sûr, il y a la vieille culture politique de l’ingérence sous le couvert des droits humains. Le gouvernement belge – qui a lui-même été condamné plus d’une fois pour violation des droits de l’homme sur sa population carcérale, par exemple – nie que les Cubains jouissent de tous les droits constitutionnels internationalement reconnus – qu’ils ont approuvés par référendum, ce qui n’est jamais arrivé en Belgique – et s’ingère dans la justice cubaine. Imaginez que Cuba réprimande notre pays parce que la justice belge condamne des syndicalistes pour leurs actions syndicales… La Belgique a condamné les peines sévères prononcées à l’encontre des émeutiers descendus dans la rue à Cuba en juillet 2021, mais n’a eu aucun problème avec la façon dont la France a réprimé les manifestations syndicales contre la réforme des retraites, qui ont pourtant fait plusieurs blessés (graves)… La France n’est bien sûr pas Cuba ni l’Iran, des pays qu’il est visiblement plus facile de rappeler à l’ordre.

Déclarations de soutien aux Nations unies

Le 1er novembre, la délégation cubaine a présenté son rapport analysant l’impact du blocus. Plusieurs pays ont ensuite pris la parole pour condamner le blocus : Le Gabon, la Jamaïque, l’Égypte, le Congo, l’Iran, le Belize, la Barbade, le Brésil (également au nom de la CELAC et du G77+Chine), le Chili, le Pérou, la Namibie, le Mexique, le Venezuela, la Chine, l’Afrique du Sud, l’Éthiopie, l’Argentine, la Biélorussie, le Kenya, l’Algérie, le Viêt Nam, la Tanzanie, l’Angola (également au nom du Mouvement des pays non alignés), la Malaisie, la République dominicaine, la Russie, etc.

Cubanismo.be suit l’affaire de près

L’ambassade de Cuba a invité le mouvement de solidarité belge à suivre ensemble les débats des Nations unies. Cubanismo.be y était représenté par Olivier Renard.

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